Trio Chemirani

Le Trio Chemirani invite...
Sortie le 28 avril 2011
Label : Accords Croisés
Djamchid, le père et maître, Keyvan et Bijan Chemirani, les deux fils, forment depuis la fin des années 1990 le Trio Chemirani, ensemble de percussions persanes. Tout en puisant dans la poésie persane, ils composent et développent des formes modernes où l’accent est mis sur les polyrythmies et sur la multiplicité des sons ; le Trio dévoile à son auditoire les possibilités infinies des percussions persanes. La parfaite concision du langage, la vertigineuse circulation du dialogue, la variation infinie du toucher conjuguées avec une complicité hors du commun, font de cette formation une réussite scénique et discographique.


– Djamchid Chemirani : Zarb, Voix
– Keyvan Chemirani : Zarb, Daf, Bendir, Udu, Cymbales
– Bijan Chemirani : Zarb, Daf, Bendir, Reeq, Udu, Saz, Cymbales
– Ballaké Sissoko : Kora
– Omar Sosa : Piano
– Renaud Garcia Fons : Contrebasse
– Ross Daly : Lyra, Robab
– Sylvain Luc : Guitare
– Titi Robin : Bouzouki
Djamchid, le père et maître, Keyvan et Bijan Chemirani, les deux fils, forment depuis la fin des années 1990 le Trio Chemirani, ensemble de percussions persanes. Tout en puisant dans la poésie persane, ils composent et développent des formes modernes où l’accent est mis sur les polyrythmies et sur la multiplicité des sons ; le Trio dévoile à son auditoire les possibilités infinies des percussions persanes. La parfaite concision du langage, la vertigineuse circulation du dialogue, la variation infinie du toucher conjuguées avec une complicité hors du commun, font de cette formation une réussite scénique et discographique.

Ce nouveau projet s’inscrit ainsi dans une volonté de présenter un travail mettant en valeur les évolutions d’une formation qui n’a cessé de se produire sur scène et a naturellement gagné en maturité. Le Trio souhaite mettre en évidence l’esprit d’ouverture qui le caractérise en invitant les artistes avec qui il a partagé la scène pendant toutes ces années ; des musiciens qui possèdent une tradition forte (musique traditionnelle, musique contemporaine, jazz...) et qui s’ouvrent sur notre vaste monde.

Emprunter les sentiers. Chercher le camp de base, non loin des sommets immaculés. L’air est pur, le ciel limpide, le calme règne. La rencontre avec des hommes remarquables est imminente. La droiture de leur posture, dos et regards droits, gestes mesurés, mains alertes, chemises blanches, la science de leurs pulpes. L’héritage culturel, millénaire et savant en bandoulière. Des itinéraires aux courbes finement négociées ont marqué les ouïes. L’histoire du trio Chemirani n’évite pas la caricature. Dans les sillons du quotidien, rien ne lui convient moins aujourd’hui que nos attentes façonnées par les empreintes lumineuses creusées depuis sa création.

De l’exil iranien de Djamchid, dans les années 60, percussionniste avant-gardiste, élevé (musicalement) sous la coupe d’un révolutionnaire émancipateur du tombak, à la beauté tricéphale du power trio avec les fils Keyvan et Bijan. De l’apport estimable d’un savoir incarné au plus profond de la culture persane puis distillé du bout des doigts, à la relève forgée dans les méandres de la tradition orale, depuis les collines du Luberon. Des nombreux élèves du papa, héritiers parsemés, imprévisibles mais finalement discrets à l’heure de l’appel. Et le naturel qui déborde à mesure que chacun des frères s’aventure chez l’Autre, dans des contrées très contrastées. Pas frileux dans la miniature, pas figé non plus dans l’ornement, marqueur fondamental de l’alphabet et de l’usage de la musique savante persane.

Djamchid, Keyvan et Bijan ont ouvert des voies, éprouvé puis calmé nos nerfs, attisé nos appétits… et continué leurs courses. Une quinzaine d’années en commun, sur scène, quelques enregistrements magnifiques et le partage de la route, partout, pour tous. À trois zarb. Beaucoup de musique, beaucoup d’amour. Aucune solennité.

Chacun a gardé les voiles gonflées, parfois loin en apparence, de la prosodie soufie distillée sans prosélytisme. Toujours plus près pour Djamchid. Des champs de l’improvisation si méticuleusement cultivés, les musiques des mondes avoisinants en ont offert des hectares. Des musiques du bassin méditerranéen, des orients proches et lointains, de l’Afrique noire et du jazz, du slam aux tensions entre les musiques traditionnelles et actuelles d’autres territoires innommables marquées par la richesse des croisements et la vérité dans la rencontre.

Le temps appelle d’autres timbres, l’instrumentarium s’est étoffé : autour du tambour en calice les frères lui ont adjoints des cousins. Le Daf, tambour sur cadre et anneaux, le Udu, cruche en terre, le Riqq, petit tambourin avec cymbalettes, le Cajon (caisse en bois, ajoutée d’un timbre), le Bendir (tambour sur cadre + timbre) bien sûr. De plus en plus présentes, les volutes venues d’en haut, des métaux, des ponctuations de cymbales ouvrant de nouvelles voies.

Le trio Chemirani a t-il muté ? Certains se cantonneront toujours à l’image du trio de percussions iraniennes, convoquant les clichés pré-cités. Après trois albums (sans compter les invitations et/ou collaborations), l’envie est venue de consigner ensemble de nouveaux morceaux sous la coupe de l’hospitalité. Les aventures scéniques peuvent-elles pour autant s’appliquer au trio ? De toute évidence.

Le trio invite donc et l’on se retrouve à nouveau au camp de base. L’air est toujours dégagé (un bel été à Paris), chaque convive aborde la séance plus ou moins équipé pour une demi-journée, pas plus, intense. L’esprit n’est plus à l’écrit. Enfin presque. Frottées, frappées, grattées ou pincées : il pleut des cordes. Sauf exception : la magnifique voix de Djamchid puisant chez les poètes mystiques persans (Saadi et Rûmî) une beauté et une profondeur imposantes, portées par la beauté de sa langue natale.

L’équation est hasardeuse à défaut d’inconnus. Que lient les mondes de Omar Sosa, Renaud Garcia-Fons, Sylvain Luc, Titi Robin, Ross Daly et Ballaké Sissoko ? Des bouts de chemin parcourus principalement avec Keyvan et Bijan, plus ou moins étirés dans le temps, les modes et les aires culturelles. Pas de règle donc. Le trio accueille chaque hôte en studio avec bienséance et simplicité. Le temps est au partage en petit comité, sans esbroufe, souvent en live. La musique s’en ressent. La nature n’aime pas le vide dit-on mais se satisfait bien de silences habités, sans doute là où excelle le trio : l’art d’accommoder le non-dit, de fractionner le silence. D’un côté la tentation de la miniature et de l’enluminure, de l’autre la préhension du vide comme meilleure amie du musicien.

Le hasard fait le reste. Comme ce jour où le pianiste cubain Omar Sosa, jovial, la toque au fait, quelques grigris au cou, tout de blanc vêtu, apparaît au studio remonté comme une horloge. La kora de Ballaké Sissoko résonne encore. La séance avec le musicien malien s’est étirée. Une rencontre s’impose, s’improvise. À eux deux d’en découdre. Ainsi née Azadeh, perle de fluidité et d’émotion, tout en retenue, que viendra, plus tard, ornementer quelques percussions. Omar et Keyvan s’étaient croisés furtivement quelques mois auparavant sur scène. L’envie d’y donner suite bouillonne.

À chaque invité, du sur-mesure. Certains apportent une partition, une intention, à l’écoute des formes proposées par le trio. Un poème, une phrase rythmique, des timbres. La dizaine de musiciens dialogue ici en réponse aux envies du moment, aux ajustements minimums et possibles que la séance leur offre. Au versement irrépressible d’un état d’âme. Rien à voir entre toutes les pointures réunies ? Au contraire. Tous leaders, maîtres et solistes. Personne n’a donc rien à prouver.

Quelques pièces pour percussions seules viennent opportunément, rappeler les fondements. Pas de long discours, oubliés les hallucinants marathons rythmiques des précédents albums. Recentrage sur des virgules, façon haïkus, des petites pièces assez dosées pour replonger dans les méandres des rythmiques savantes. Le zarb, pilier du trio, se fait également plus discret qu’à l’accoutumée. Seul Djamchid en conserve l’usage exclusif quand Keyvan et Bijan se délectent à varier les timbres.

Chaque invité saisit différemment le moment. Pointe alors une idée certaine du détachement et de l’élégance, cousins parfois fort éloignés de la virtuosité… de sorte que la mosaïque obtenue ne relève jamais d’une prise de pouvoir de l’un au détriment de l’autre. D’un côté la précision de compositeurs exigeants, trop heureux d’offrir leurs grilles aux mains du trio, de l’autre des improvisateurs arrivés le jour même avec une folle envie de voltiges à plusieurs. La valse prend des allures variées : du plus simple appareil (l’invité + percussions) en live, au long processus de re-re consistant à empiler, ajuster, ajouter… broder une pièce au long cours. Un inventaire des architectures inciterait à la comparaison là où l’on souhaiterait juste inviter à l’écoute.

Tentons quelques indices :

Le contrebassiste Renaud Garcia-Fons est parfaitement déroutant sur une composition aux couleurs indiennes dans laquelle la présence des udu (cruches) et son phrasé à l’archet activent à s’y méprendre, le clin d’oeil avec le sarangi et la musique indienne. Ross Daly, le plus crétois des irlandais, proposent deux plages très différentes, deux pièces écrites et concises, évocations d’un Orient indéfini et d’une alchimie atypique aux accents à la fois méditerranéen et slave, tantôt à la lyra crétoise ou sur son étonnant « home-made » Tarhu, instrument unique et envoûtant. La finesse du jeu de Ballaké Sissoko à la kora reste un modèle du genre. Compagnon de Keyvan depuis la création le Rythme de la parole, le malien est totalement libéré, aérien. Une ritournelle suffit et la suite coule de source. Titi Robin et son bouzouki apportent une couleur discrète et toute en finesse, magnifiquement portée par le trio. Une alchimie épurée mais gorgée de la puissance des daf (relayés par les zarb) et de la prosodie de Djamchid. Sylvain Luc quant à lui, a aménagé ses propres espaces, tout en acoustique, en étirements du temps, en propositions égrenées tranquillement, augmentées de petites retouches. Deux morceaux particulièrement portés par une certaine idée du don...

Sept ans après son précédent enregistrement, le trio Chemirani revient nourri de riches expérimentations. Et plutôt que de complexifier le discours à force d’y ajouter trop de souvenirs de voyages, cette valse entre hommes (décidément) remarquables offre in fine une élégante vision du partage dont l’apparente simplicité et la facilité d’écoute sont la plus belle des invitations à poursuivre ces aventures sur scène.

Fred Soupa
Djamchid Chemirani : Zarb, Voix
Keyvan Chemirani : Zarb, Daf, Bendir, Udu, Cymbales
Bijan Chemirani : Zarb, Daf, Bendir, Reeq, Udu, Saz, Cymbales
Ballaké Sissoko : Kora
Omar Sosa : Piano
Renaud Garcia Fons : Contrebasse
Ross Daly : Lyra, Robab
Sylvain Luc : Guitare
Titi Robin : Bouzouki

Fils de Djelimady Sissoko, Ballaké Sissoko honore la grande tradition de la kora mandingue tout en lui apportant des accents de modernité.

Le pianiste et compositeur Omar Sosa est un créateur qui trouve son inspiration dans la musique traditionnelle cubaine (santeria, yoruba...), dans le jazz le plus contemporain, le hip hop ou encore la musique arabe ou africaine.

Le contrebassiste Renaud Garcia-Fons traverse les frontières du jazz et des musiques du monde, de l’Andalousie jusqu’en Inde du sud.

Musicien longtemps nomade, l’irlandais Ross Daly s’est fixé en Grèce au milieu des années ’70 en épousant les contours et les profondeurs de la riche culture musicale de ce pays sans jamais cesser d’être ce qu’il est vraiment : un artiste profondément original.

Guitariste atypique, improvisateur d’instant et d’instinct servi par un sens du swing, une maîtrise du temps et du son. Sylvain Luc possède le don de faire passer l’évidence de la mélodie avant tout étalage d’une virtuosité instrumentale qui force l’admiration...

Autodidacte nomade, Titi Robin traverse les époques et la planète avec ses cordes au bout des doigts. Maître du oud, du bouzouk et de la guitare, son école est la rue, son plaisir, les rencontres du sud de l’Europe à l’Asie Centrale.