Shahin Novrasli

From Baku To New York City
Sortie le 13 septembre 2019
Label : Jazz Village / Pias
Enfant prodige – à l’âge de onze il est projeté devant l’Orchestre Symphonique d’Azerbaïdjan -, Shahin Novrasli a pourtant pris son temps pour devenir le pianiste qu’il est aujourd’hui. De solides études classiques au rythme des grandes œuvres du répertoire, une initiation exemplaire au jazz mugham, cette greffe de la grande musique américaine sur la tradition musicale azérie, une discographie substantielle avec six albums enregistrés aux côtés de Nathan Peck, Sasha Mashin, André Ceccarelli, Didier Lockwood ou Ari Hoenig et, last but not least, un parrainage illustre quand le regard bienveillant de Ahmad Jamal s’est posé sur lui lors de ses séjours américains ?
Enfant prodige – à l’âge de onze il est projeté devant l’Orchestre Symphonique d’Azerbaïdjan -, Shahin Novrasli a pourtant pris son temps pour devenir le pianiste qu’il est aujourd’hui. De solides études classiques au rythme des grandes œuvres du répertoire, une initiation exemplaire au jazz mugham, cette greffe de la grande musique américaine sur la tradition musicale azérie, une discographie substantielle avec six albums enregistrés aux côtés de Nathan Peck, Sasha Mashin, André Ceccarelli, Didier Lockwood ou Ari Hoenig et, last but not least, un parrainage illustre quand le regard bienveillant de Ahmad Jamal s’est posé sur lui lors de ses séjours américains ? Le chemin parcouru est déjà solide. Il en faudrait pourtant beaucoup moins pour ne pas sortir grandi de ce voyage qui a mené Shahin Novrasli de Bakou à New York. Un périple qui prend aujourd’hui une dimension nouvelle. De parrain, Ahmad Jamal est en effet passé producteur, prodiguant tous les avantages d’une exceptionnelle carrière et d’un incomparable expérience. C’est aussi sa propre section rythmique – James Cammack à la contrebasse et Herlin Riley à la batterie – que le maître a confiée à son disciple. On devine d’ailleurs que la relecture décoiffante des deux antiennes du bop que sont « 52sd Street Theme » et « Salt Peanuts » ont dû recevoir les faveurs d’Ahmad Jamal, lui qui n’a jamais eu à cœur de jouer deux fois les mêmes grilles. Comme en retour, il y a fort à parier que Shahin Novrasli s’est approprié de l’interprète immortel de « Poinciana » le don de sculpter les contrastes en abordant les ballades « Night Song » et « She’s Out of My Life », bien soutenu en cela par une rythmique frissonnante. Les musiciens de jazz sont épris de Joni Mitchell, c’est un fait. Et s’ils sont nombreux à s’être intéressés à « Both Side Now », peu en ont capté l’esprit originel avec autant d’acuité que celle dont fait preuve Shahin Novrasli au cours de ce numéro de funambule et incipit idéal. On irait trop vite à ranger Keith Jarrett et Bill Evans dans les influences les plus définitives du pianiste. Pourtant, dans un fascinant triptyque, « Stella by Starlight » se retrouve comme sertie par deux compostions renvoyant Shahin Novrasli autant à ses racines qu’à ces deux figures du piano moderne. « Memories » offre une magnifique porte d’entrée à l’univers musical de Vagif Mustafazadel, son compositeur et célèbre pour avoir jeté les bases du mugham, variété azérie du jazz dont la sublime mélancolie sonne ici comme un blues caucasien.

De blues et de mélancolie, il en est aussi question avec « Cry of Gulchura » qui conclut l’album en un duo contrebasse-piano, profond, nocturne et intensément lyrique, comme ceux que gravèrent un jour Keith Jarrett et Charlie Haden. On ne saurait omettre la contribution du Shahin Novrasli compositeur inspiré avec « Shahin’s Day », un thème joueur et intrigant qui laisse espérer les grandes dispositions du pianiste dans ce domaine. De Bakou à New York, l’Europe et la France sont naturellement sur la route de Shahin Novrasli. Et il est heureux que le pianiste y ait enregistré cet album qui, deux ans après la réussite de Emanation, contribuera sans nul doute à lui ouvrir de nouveaux horizons.