Macha Gharibian
Joy Ascension Live EP
Sortie le 17 septembre 2021
Label: Meredith Prod
En janvier 2020 sortait Joy Ascension, son troisième album et Macha Gharibian démarrait l’année sur une belle lancée annoncée. La pandémie en décidait autrement. Le trio réussit à sauver quelques concerts à l’automne. Primée aux Victoires du Jazz dans la catégorie Révélation, Macha Gharibian espère bien jouer le répertoire de son album sur scène mais la réouverture des salles se fait attendre. En avril 2021, les musiciens se retrouvent et enregistrent cinq titres en live pour le salon Jazz Ahead. La musique a gagné en puissance, en profondeur, comme si le temps de silence avait fait mûrir les morceaux, au point que l’interaction et le plaisir du jeu ensemble se ressentent à fleur de peau.
Voici un live enregistré par Macha Gharibian dans la continuité de son 3ème album Joy Ascension, avec son trio composé de Dré Pallemaerts (Batterie) & Chris Jennings (Contrebasse). Un trio de haut vol qui s’affirme avec trois coloristes aux personnalités uniques.
Voici un live enregistré par Macha Gharibian dans la continuité de son 3ème album Joy Ascension, avec son trio composé de Dré Pallemaerts (Batterie) & Chris Jennings (Contrebasse). Un trio de haut vol qui s’affirme avec trois coloristes aux personnalités uniques.
Pour son troisième album ambitieux au titre coltranien, Joy Ascension, Macha Gharibian assume sa posture de pianiste, chanteuse, auteure, compositrice, arrangeuse, réalisatrice et leader. Autour d’elle, deux coloristes qui manient les notes comme de la gouache, le batteur Dré Pallemaerts et le contrebassiste Chris Jennings, plus deux invités, Bert Joris qui dessine avec sa trompette des fulgurances cool à la Chet sur la ballade aérienne The Woman I Am Longing To Be et Artyom Minasyan qui renforce avec son doudouk l’hypnotique Sari Siroun Yar. La voix volcanique de Macha Gharibian la fait entrer dans la famille des vocalistes solaires et habitées, ce club très fermé qui va de Nina Simone à Mélissa Laveaux. Album d’une femme libre et d’une artiste de son époque, Joy Ascension est un disque précieux qui vient réveiller nos sens."
Comme une suite d’autoportraits en musique et en mots, les titres de cet album composent ensemble le manifeste d’une femme libre et d’une artiste de son époque ; quelqu’un de rare, qui ne triche pas et qui livre ses émotions, ses tourments et son exaltation, à travers une petite dizaine de pastels qui s’égrènent dans une évidence saisissante.
Après deux premiers albums que l’on peut voir aujourd’hui comme des esquisses plus qu’abouties, Mars en 2013 et Trans Extended trois ans plus tard, Macha Gharibian a fixé ses toiles sur leurs châssis. Elles sont restées vierges quelque temps car il fallait laisser mûrir les premiers croquis, tous issus de moments de vie intenses. Et peu à peu ils ont pris corps, au fil d’une résidence à Marciac puis de quelques concerts à La Gare, deux ateliers symboliques, le premier au cœur de l’une des capitales mondiales de la musique, le second au-dessus des rails rouillés et parfumés de blues de la Petite Ceinture à Paris, deux boussoles dans un lumineux processus de création.
Les tableaux n’ont pas été si longs à peindre : trois jours d’enregistrement, pas plus pas moins, grâce à cette extrême concentration que seul sans doute un trio peut offrir dans sa formule la plus aboutie, compacte et télépathique. Pas n’importe quel trio : Macha Gharibian au milieu telle une calligraphe virtuose, assumant sa position un peu schizophrénique de pianiste, chanteuse, auteure, compositrice, arrangeuse, réalisatrice et leader, excusez du peu. Autour d’elle, deux coloristes qui manient les notes comme de la gouache, tels des habitués de planètes musicales en apesanteur. Le batteur belge Dré Pallemaerts a côtoyé Fred Hersch et Tom Harrell, Yusef Lateef et Mélanie de Biasio, il sait caresser ses peaux et ses cymbales comme une palette inépuisable. Quant au Canadien Chris Jennings, qui a travaillé́ avec Dhafer Youssef, Tigran Hamasyan, ou encore Titi Robin, ses lignes de contrebasse sont comme un enduit aux nuances sensuelles et pleines de groove. Et puis, deux enlumineurs ont été conviés à la cérémonie, Bert Joris qui dessine avec sa trompette des fulgurances cool à la Chet sur la ballade aérienne The Woman I Am Longing To Be, Artyom Minasyan qui renforce avec son doudouk l’hypnotiqueSari SirounYar, un clin d’œil affectueux à son père et à Bratsch.
Les premières mesures de Joy Ascension, ce morceau au titre coltranien qui donne son nom au disque, sont un éblouissement. Comme pour mieux nous surprendre – et se surprendre aussi ? –, la pianiste s’efface derrière la chanteuse et sa voix volcanique la fait rentrer d’emblée dans l’école des vocalistes habitées, ce club très fermé qui va de Nina Simone et Jeanne Lee jusqu’à Mélissa Laveaux. On retrouve son timbre puissant sur une autre plage, le solo piano-voix intime Crying Bohemia, entre vallée de larmes et incantation.
La musicienne aime arpenter les grands espaces, sans doute parce qu’ils donnent une force qui agit comme un exorcisme sur le quotidien.
On les respire dans les crescendos de Georgian Mood qui sonne comme un thème de folklore inventé, on les hume dans la texture art brut de Fight. Dans ces deux pièces, une subtile alchimie entre le piano acoustique et le Fender Rhodes opère. Même choc avec la sorcellerie rythmique de Freedom Nine Dance et son chorus turbo-folk de synthétiseur kitsch. Et que dire de 50 Ways To Leave Your Lover, ce thème de Paul Simon que Brad Mehldau s’était déjà approprié et où Dré Pallemaerts prend plaisir à réinventer cette fameuse tournerie de batterie de Steve Gadd qui rend fous les batteurs du monde entier depuis 45 ans !
Les spécialistes utilisent parfois les rayons X pour décrypter les différentes couches d’une peinture. Si ce procédé était utilisé ici, c’est tout un cheminement que l’on découvrirait : une approche spontanée et inventive, la décision de bannir toute démonstration gratuite, l’architecture d’une épure où il ne doit pas y avoir une seule note de trop, le parti-pris d’exploiter toute la dimension des instruments. On y verrait enfin, au-delà des dégradés de lumière mélodiques et des cellules rythmiques qui s’entrechoquent, la pulsation de la vie, toute une richesse qui fait de Joy Ascension un disque précieux qui vient réveiller nos sens.
Comme une suite d’autoportraits en musique et en mots, les titres de cet album composent ensemble le manifeste d’une femme libre et d’une artiste de son époque ; quelqu’un de rare, qui ne triche pas et qui livre ses émotions, ses tourments et son exaltation, à travers une petite dizaine de pastels qui s’égrènent dans une évidence saisissante.
Après deux premiers albums que l’on peut voir aujourd’hui comme des esquisses plus qu’abouties, Mars en 2013 et Trans Extended trois ans plus tard, Macha Gharibian a fixé ses toiles sur leurs châssis. Elles sont restées vierges quelque temps car il fallait laisser mûrir les premiers croquis, tous issus de moments de vie intenses. Et peu à peu ils ont pris corps, au fil d’une résidence à Marciac puis de quelques concerts à La Gare, deux ateliers symboliques, le premier au cœur de l’une des capitales mondiales de la musique, le second au-dessus des rails rouillés et parfumés de blues de la Petite Ceinture à Paris, deux boussoles dans un lumineux processus de création.
Les tableaux n’ont pas été si longs à peindre : trois jours d’enregistrement, pas plus pas moins, grâce à cette extrême concentration que seul sans doute un trio peut offrir dans sa formule la plus aboutie, compacte et télépathique. Pas n’importe quel trio : Macha Gharibian au milieu telle une calligraphe virtuose, assumant sa position un peu schizophrénique de pianiste, chanteuse, auteure, compositrice, arrangeuse, réalisatrice et leader, excusez du peu. Autour d’elle, deux coloristes qui manient les notes comme de la gouache, tels des habitués de planètes musicales en apesanteur. Le batteur belge Dré Pallemaerts a côtoyé Fred Hersch et Tom Harrell, Yusef Lateef et Mélanie de Biasio, il sait caresser ses peaux et ses cymbales comme une palette inépuisable. Quant au Canadien Chris Jennings, qui a travaillé́ avec Dhafer Youssef, Tigran Hamasyan, ou encore Titi Robin, ses lignes de contrebasse sont comme un enduit aux nuances sensuelles et pleines de groove. Et puis, deux enlumineurs ont été conviés à la cérémonie, Bert Joris qui dessine avec sa trompette des fulgurances cool à la Chet sur la ballade aérienne The Woman I Am Longing To Be, Artyom Minasyan qui renforce avec son doudouk l’hypnotiqueSari SirounYar, un clin d’œil affectueux à son père et à Bratsch.
Les premières mesures de Joy Ascension, ce morceau au titre coltranien qui donne son nom au disque, sont un éblouissement. Comme pour mieux nous surprendre – et se surprendre aussi ? –, la pianiste s’efface derrière la chanteuse et sa voix volcanique la fait rentrer d’emblée dans l’école des vocalistes habitées, ce club très fermé qui va de Nina Simone et Jeanne Lee jusqu’à Mélissa Laveaux. On retrouve son timbre puissant sur une autre plage, le solo piano-voix intime Crying Bohemia, entre vallée de larmes et incantation.
La musicienne aime arpenter les grands espaces, sans doute parce qu’ils donnent une force qui agit comme un exorcisme sur le quotidien.
On les respire dans les crescendos de Georgian Mood qui sonne comme un thème de folklore inventé, on les hume dans la texture art brut de Fight. Dans ces deux pièces, une subtile alchimie entre le piano acoustique et le Fender Rhodes opère. Même choc avec la sorcellerie rythmique de Freedom Nine Dance et son chorus turbo-folk de synthétiseur kitsch. Et que dire de 50 Ways To Leave Your Lover, ce thème de Paul Simon que Brad Mehldau s’était déjà approprié et où Dré Pallemaerts prend plaisir à réinventer cette fameuse tournerie de batterie de Steve Gadd qui rend fous les batteurs du monde entier depuis 45 ans !
Les spécialistes utilisent parfois les rayons X pour décrypter les différentes couches d’une peinture. Si ce procédé était utilisé ici, c’est tout un cheminement que l’on découvrirait : une approche spontanée et inventive, la décision de bannir toute démonstration gratuite, l’architecture d’une épure où il ne doit pas y avoir une seule note de trop, le parti-pris d’exploiter toute la dimension des instruments. On y verrait enfin, au-delà des dégradés de lumière mélodiques et des cellules rythmiques qui s’entrechoquent, la pulsation de la vie, toute une richesse qui fait de Joy Ascension un disque précieux qui vient réveiller nos sens.