Kiran Alhuwalia

Wanderlust
Sortie le 23 juin 2008
Label : World Connection
« Kiran Ahluwalia, une voix et une grâce renversantes qui tisse des liens délicieux entre les riches traditions du ghazal indien, du blues de l’orient et du fado portugais »
Kiran Ahluwalia est une voix pure. Un timbre cristallin qui apaise, chante des odes contemplatives. Des poésies qui ressemblent à des berceuses ou à de délicates prières. Une ferveur sereine qui se répand avec une douceur infinie. Kiran déclame le ghazal, une musique dont les formes courent du sous-continent indien à l’Afghanistan en passant par l’Iran. A sa manière, plus moderniste et universelle, Kiran Ahluwalia serait l’héritière d’un genre où les femmes sont prépondérantes à l’exemple des Indiennes Begum Akhtar, Shobha Gurtu (les préférées de la jeune chanteuse), Indira Misra, Asha Bosle ou la Pakistanaise Abida Parveen, ses illustres aînées, chanteuses d’une musique que Bollywood utilise aussi abondamment. Le ghazal (qui tient son nom de la poésie arabe médiévale amoureuse, parfois érotique et mystique, et signifie parler amoureusement avec une femme), a été introduit dans le sous-continent indien au XIIe siècle. Traduit en Occident dès la fin du XVIIe, le ghazal a été employé au XIXe siècle par des poètes allemands (Goethe), anglais (Shelley, Byron, Thomas Moore) et plus tard par des auteurs américains (Robert Bly, Adrienne Rich, W. S. Merwin, Jim Harrison, Galway Kinnell, Marilyn Hacker) et canadiens (John Thompson). Au croisement des cultures persanes, afghanes et indiennes, accompagné au sârangî (vièle), au rebab (ancêtre du violon) ou au dilrûbâ (ancêtre du sitar), le chant ghazal se compose généralement de 5 à 15 couplets de deux vers chacun, considérés comme des poèmes en soi et comparés aux perles d’un même collier. Style semi-classique, prisé surtout en Inde du Nord, le ghazal de Kiran Ahluwalia est une musique ouverte, universelle bien que nourrie par une tradition séculaire, et qu’elle a chantée aux Etats-Unis, au Canada, en Inde, au Pakistan, et dans toute l’Europe « J’écoute de la musique africaine, classique occidentale, du jazz certaines musiques électroniques, et aussi tout ce qui est nouveau et que j’aime », raconte la chanteuse. Il faut dire que Kiran est née en Inde, a grandi au Canada et vit à New York depuis qu’elle s’est mariée avec son guitariste et arrangeur Rez Abbasi, natif du Pakistan.

« J’ai vécu à New York pendant trois ans avant de m’y installer définitivement. Ma maison de disque à l’époque et mon nouveau label s’y trouvent. J’étais très souvent en tournée et n’avais guère de point de chute. New York est une ville passionnante où il y a toujours beaucoup de musiques à écouter, d’expositions à voir », raconte l’artiste, née dans un milieu musical. Malgré leur apprentissage de la musique et leurs participations à des concours musicaux, les parents de Kiran n’en ont pas fait leur profession. « Ils étaient mes premiers professeurs de musique et m’ont toujours encouragée, j’ai commencé à apprendre la musique indienne dès mes sept ans », dit la chanteuse qui a écouté et prête encore l’oreille à tous les styles musicaux indiens, du classique au plus folklorique, les comédies musicales populaires. « Chaque genre me donne des émotions différentes. Mais l’impact du ghazal sur moi reste le plus fort. Le ghazal est la musique où je me retrouvais le plus en grandissant. Il m’a donné le plus de réconfort et je m’y sens mieux pour composer et chanter », raconte Kiran qui a appris son art auprès du maître Vithal Rao à Hyderabad, dans le Sud de l’nde, et de la chanteuse Padma Talwalkar à Bombay. Un apprentissage classique qui lui permet d’aborder avec une aisance exceptionnelle d’autres musiques, à l’exemple de ce nouvel enregistrement (son quatrième album) où la plénitude du ghazal côtoie quelques rythmes du Sahel, du jazz et surtout le fado. Une rencontre avec la saudade lisboète portée par trois morceaux magiques Jo Dil, Haal-e Dil, et Hath Apne, que Kiran chante d’une voix majestueuse. « Pour moi, le fado, c’est le ghazal portugais. Ils ont la même émotion. Dans les deux genres, il y a des chansons sur la nostalgie, l’aspiration à quelque chose d’inaccessible. En écoutant le fado, j’ai pensé que ce serait impressionnant de composer certaines de mes ghazals avec du fado instrumental, mais je ne croyais pas que cela pourrait se produire », dit la chanteuse. Mais une tournée au Portugal avec le groupe de son mari lui a donné l’occasion de contacter des musiciens portugais pour enregistrer à Lisbonne. « Certains des musiciens portugais ne parlaient pas anglais, mais dès que nous avons commencé à répéter nous étions capables de communiquer musicalement. Cela a été une expérience merveilleuse », dit la belle voix du ghazal, dont ce disque est le premier à sortir en Inde, le pays de son inspiration, sur le mythique label HMV.

Dix titres qui illustrent à merveille une passionnante fusion des genres.