Edmony Krater

J'ai traversé la mer
Sortie le 21 août 2020
Label: Heavenly Sweetness
Avant-gardiste, percussionniste, chanteur, auteur, compositeur, trompettiste autodidacte, depuis la fin des années 70 et la formation Gwakasonné, Edmony Krater est une référence de la musique antillaise.
Avant-gardiste, percussionniste, chanteur, auteur, compositeur, trompettiste autodidacte, depuis la fin des années 70 et la formation Gwakasonné, Edmony Krater est une référence de la musique antillaise.

Discret et néanmoins actif c’est en 2015 qu’il s’est à nouveau retrouvé dans la lumière, quand Heavenly Sweetness a réédité Ti Jan Pou Velo, son album enregistré en 1988 avec son groupe Zepiss. Un disque devenu rare et possédé seulement par quelques collectionneurs avisés. Après An Ka Sonjé (2018), il revient avec J’ai Traversé La Mer.

Bien longtemps avant Edmony Krater, ils sont des centaines de milliers à avoir traversé la mer. Arrachés à l’Afrique, pris dans la logique violente et absurde du commerce triangulaire, ils ont été disséminés de force en Amérique, dans les Caräibes ou en Europe, créant de fait une diaspora noire. Les siècles passant, leurs descendants sont devenus écrivains, poètes, dirigeants, sportifs, musiciens.

Quand, ailleurs dans le monde, ils créaient le blues, le reggae, le jazz, la soul, le funk, c’est au son du tambour gwoka qu’en Guadeloupe d’autres forgeaient leur identité musicale. Sous ses martèlements cadencés qu’ils rythmaient les fêtes, portaient leurs revendications, exprimaient leurs colères.

Indissociable de la culture Guadeloupéenne, Edmony Krater a fait du gwoka le socle de J’ai Traversé La Mer. En le rappelant à l’une de ses fonctions ancestrales, celle de communiquer, il a transformé la puissante percussion en aimant rythmique sur lequel toutes les musiques qui l’ont façonné et inspiré dans son parcours de musicien sont venues s’agglutiner et s’agréger.

En les entremêlant les unes aux autres Edmony a défini une vision moderne et contemporaine du gwoka, loin de toute folklorisation mais strictement fidèle à l’identité guadeloupéenne. 

Une identité qu’il fait voyager dans des notes de jazz cuivrées ou les boucles séquencées d’une boîte à rythmes. Passer des circuits imprimés d’un synthétiseur aux cordes pures d’un piano. Le gwoka en filigrane plus ou moins affirmé mais toujours présent, contenu dans les rails pour assurer la colonne vertébrale d’un morceau, compagnon de jeu avec lequel les musiciens organisent de folles courses de solistes sur lesquelles il abat ses orages percussifs.

Une identité au militantisme affirmé, qui se rappelle au tumulte politico-social d’une île dont les trésors naturels meurent sous les nuisances chimiques. Qui se remémore le passé et en fait un moteur pour aller de l’avant, plutôt qu’un éternel sujet de rancoeur.

Réunissant autour de lui deux générations de musiciens* (les percussions de Roger Raspail, la batterie de Sonny Troupé, la basse de Julian Babou et celle de Live I, les claviers de Jonathan Jurion), Edmony Krater assure ce rôle de transmission qui habite la musique gwoka depuis toujours.

Une musique qui, avec J’ai Traversé La Mer, n’a jamais autant regardé vers son futur.

*De Kassav au violoncelliste Vincent Ségal, il existe une palette de styles musicaux mais peu que Roger Raspail n’a pas explorés. De Cesaria Evora au pianiste Mal Waldron, de la bossa au free-jazz en passant par le calypso, son art de frapper les peaux est une denrée rare et recherchée  et c’est souvent le mot “légende” qui revient quand on évoque le maître du gwoka.

Venu à la musique par le hip hop, c’est dans l’océan Indien que Julian Babou a puisé son groove. Attaché à ses racines Réunionnaises, il met ses lignes de basse au service du séga et du maloya, deux styles musicaux de son île qu’il s’applique aujourd’hui à moderniser.

Férocement caribéen dans son jazz, les enseignements du pianiste Mario Canonge auront été pour Jonathan Jurion plus instructifs que des décennies d’apprentissage. Paru en 2019, son album Le Temps Fou - The Music of Marion Brown, invite le gwoka dans ses partitions. Et n’a reçu qu’éloges amplement méritées.

A son aise sur du jazz, du funk, du métal ou dans un orchestre symphonique, on retrouve les baguettes de Sonny Troupé sur les albums de Dédé Saint Prix, Jacques Schwarz Bart ou encore Magik Malik. Sa dernière collaboration l’a amené aux côtés de la rappeuse Casey pour une rencontre entre le jazz, le hip hop et le gwoka.

Après de nombreuses années passées en Afrique aux côtés de groupes locaux, c’est désormais en France que I Live produit et réalise. A la fois ingénieur du son et bassiste, il officie des deux côtés de la console, qu’il s’agisse de funk, de hip hop, de musiques africaines, mais surtout, de reggae.