Dowdelin

Lanmou Lanmou
Sortie le 28 janvier 2022
Label: Underdog Records
Aucun lieu de la musique n’est fixe. Aucune musique ne peut rester immobile. Mais il est rare qu’elle se dérobe autant à la géographie et à la généalogie qu’avec Dowdelin. Langue créole, beat de la Caraïbe, énergies urbaines, virtuosité éclatante, électro sensuelle. Le groupe joue en un lieu singulier où s’emmêlent les genres et les couleurs, les héritages et les audaces.
Aucun lieu de la musique n’est fixe. Aucune musique ne peut rester immobile. Mais il est rare qu’elle se dérobe autant à la géographie et à la généalogie qu’avec Dowdelin. Langue créole, beat de la Caraïbe, énergies urbaines, virtuosité éclatante, électro sensuelle. Le groupe joue en un lieu singulier où s’emmêlent les genres et les couleurs,
les héritages et les audaces.

Lanmou lanmou, le deuxième album de Dowdelin, brouille les cartes, les pistes, les lignes – tout ce qui devrait rassurer les conservateurs et les paresseux, les défenseurs du reggae officiel, du zouk correct, du jazz breveté ou de la biguine canal historique. Comme avec les langues, les cultures et les nations de la Caraïbe qui ne sont jamais tout à fait d’Europe ni complètement d’Afrique, on serait très embarrassé si l’on devait définir où est exactement Dowdelin en cherchant sur le planisphère officiel des musiques – un afro- futurisme créole, un carrefour de l’Atlantique noir...

Au commencement de l’aventure Dowdelin, un entrelac de rencontres et de fidélités. David Kiledjian alias Dawatile, producteur et compositeur multi-instrumentiste rencontre Olivya, chanteuse lyonnaise d’origine martiniquaise. Ils bœufent et maquettent des titres en anglais. Rien de très probant jusqu’à ce qu’elle commence à chanter alors créole. Tout s’éclaire alors : la langue des petites iles françaises des Antilles déploie sa révolutionnaire universalité.

David rappelle alors Raphaël Philibert, percussionniste, saxophoniste et chanteur engagé depuis toujours dans l’extension du domaine du gwo ka, musique tambourinaire de la Guadeloupe dont son oncle, Georges Troupé, est un audacieux aventurier. C’est la naissance de Dowdelin et l’évidence se confirme : on se souvient alors que quand le poète et théoricien Édouard Glissant parle de la créolité comme d’un vertige de l’imprédictibilité, il parle d’une aventure que rien n’annonce dans l’histoire du monde : des Européens et des Africains précipités sur un tiers continent où, dans le rêve fou de créer un Nouveau Monde et dans le crime de masse de l’esclavage et de la spoliation des peuples amérindiens, naissent des langues, des cultures, des musiques – métissages, catharsis, ivresses, résistances.

Dowdelin sort son premier album, Carnival Odyssey, en 2018. Les esprits gourmands s’enflamment pour une musique aux contours mouvants et aux cousinages innombrables. C’est la confirmation que les militants de la pureté auront toujours des problèmes avec les identités métisses – « pas assez jazz pour mon festival », « c’est trop pour le mien » ... Mais nombreux concerts en France et Grande-Bretagne principalement et gros buzz chez les amoureux du vertige de la musique libre.

Le cercle s’élargit avec l’arrivée de Greg Boudras, batteur qui a travaillé avec David dans d’autres aventures (Vaudou Game, Fowatile, The Bongo Hop...), pour compléter Dowdelin et concevoir ce deuxième album. La feuille de route ? « Nous ne cherchons pas à réaliser des combinaisons d’expériences ou des patchworks conscients de nos influences, résume David. Il s’agit plus de ressentis, de mélanges qui se produisent inconsciemment. Alors, parfois, on voit surgir des choses qui nous surprennent nous-mêmes, comme un fragment d’un tube anglais de synth pop, que nous sommes les seuls à reconnaitre. Il n’y a jamais deux fois la même recette : une chanson que j’ai faite à la maison avec mes instruments et les jouets de ma fille, des sound designs sur lesquels Raphaël et Greg apportent des éléments rythmiques qui changent tout, des compositions plus collectives... »

Puis les textes émergent, écrits en créole, anglais ou français par David et Raphaël, par ailleurs linguiste et expert des langues créoles. Messages d’amour et de combat, de fraternité et de mémoire... Et, de titre en titre, la dynamique généreuse de la créolisation est toujours à l’œuvre, la biguine s’enlaçant au hip hop, le jazz contemporain se tissant avec le reggae, le créole dialoguant avec la vaste palette des musiques qui sont ses filles ou ses sœurs...