Ali Reza Ghorbani

Les Chants Brûlés - Hommage à Rûmî
Sortie le 22 mai 2010
Label : Accords Croisés
Ali Reza Ghorbani rend hommage à Rûmî grand poète persan du XIIIe siècle.

Jalâl ud Dîn Rûmî est un grand mystique persan qui a profondément in-fluencé le soufisme. Un des plus grands poètes iraniens, son nom est in-timement lié à l’Ordre des Derviches Tourneurs, une des principales confréries soufies, qu’il fonda dans la ville de Konya, située aujourd’hui en Turquie. De nos jours les Iraniens, les Turcs et les Arabes continuent d’admirer ses poèmes. Reconnu de son vivant comme un saint, il aimait fréquenter les Chrétiens, les Juifs et des personnes d’autres confessions, tout autant que les Musulmans.
Rûmî avait des prises de position assez novatrices par rapport au pouvoir politique et au dogme islamique.
Ali Reza Ghorbani appartient à la génération née dans les années 1970, de celle qui s’est trouvée « jeune pousse », confrontée à la révolution iranienne sur des questions aussi basiques que la place de la musique dans la société et plus précisément dans une république islamique.

Né dans une famille religieuse, Ali Reza Ghorbani a appris très jeune la prosodie et la cantillation du Coran en arabe et comme bon nombreux de sa génération, il a découvert la musique persane classique à la radio. Dans son souvenir (il avait 13 ou 14 ans) il a entendu sur les ondes Banan (grand maître du chant et de la musique persane, décédé en 1986) : « Bien que je n’ai pas compris le sens et le système musical, ce chant m’a bouleversé et j’ai senti que cela venait de quelque chose de profond et de spirituel. Je crois d’ailleurs que si tout jeune vous n’êtes pas littéralement bouleversé, vous ne pouvez pas devenir un bon musicien. Il faut à un moment donné se sentir possédé par la musique. Je crois que je l’ai compris dès ma première leçon quand je me suis trouvé devant la question de la profondeur des sentiments. »

Comment Ali Reza Ghorbani a su organiser sa relation entre la foi et la musique ? Il montre sa main et ses phalanges pour dire à l’image des doigts qui forment une unité, la main, ce que réciter le Coran (les paroles de Mahomet) peut avoir de commun avec le fait de chanter la poésie de Rûmî, Hafez ou de Saadi : « Cela n’est pas si différent. » Il en va de même pour dire des paroles sacrées, même si de par mon premier enseignement, les intonations arabes me sont plus familières, me sont immédiates comme les textes se référant au Coran et à la mystique soufie. »

Depuis sa première leçon de chant traditionnel, Ali Reza Ghorbani pousse sa recherche personnelle vers une démarche intime. (…)

Pour cet enregistrement « Les chants brûlés » Ali Reza Ghorbani a su s’entourer de jeunes musiciens issus de la même talentueuse génération : Hamid Reza Khabbazi (Tar), Shervin Mohajer (Kamancheh), Saman Samimi (Kamanche), Rashid Kakavand (Tonbak&Daf), Eshagh Chegini (Ney).

Ali Reza Ghorbani rend hommage à Rûmî, grand poète persan du XIIIe siècle.

Jalâl ud Dîn Rûmî est un grand mystique persan qui a profondément in-fluencé le soufisme. Un des plus grands poètes iraniens, son nom est in-timement lié à l’Ordre des Derviches Tourneurs, une des principales confréries soufies, qu’il fonda dans la ville de Konya, située aujourd’hui en Turquie. De nos jours les Iraniens, les Turcs et les Arabes continuent d’admirer ses poèmes. Reconnu de son vivant comme un saint, il aimait fréquenter les Chrétiens, les Juifs et des personnes d’autres confessions, tout autant que les Musulmans.

Rûmî avait des prises de position assez novatrices par rapport au pouvoir politique et au dogme islamique.

Djalâl-ud-Dîn Mohammad Balkhi, connu sous le nom de Mo-wlavi, Mowlânâ ou bien sous celui de Rûmî, naquit en 1207 à Balkh, ville faisant partie de l’Afghanistan nommée au-jourd’hui Mazaré Sharif (en son temps, l’étendue de l’Iran dé-passait largement sa superficie actuelle).

Son père, Bahâ ud Dîn Walad, était un célèbre théologien et prédicateur. Lors de l’invasion mongole, la famille dut s’enfuir et finit par s’installer à Konya en Anatolie.

A la mort de son père, bien qu’il n’ait que 24 ans, il lui succé-da comme professeur de théologie ; il entreprit alors de ren-contrer les grands maîtres soufis.

En 1244, son existence fut bouleversée par sa rencontre avec Shams de Tabriz. Rûmî devint son disciple passionné et aban-donna ses cours de théologie, ce qui suscita le mécontente-ment et la jalousie de ses propres disciples. De son côté Shams fut la cible de la colère de ces derniers, à tel point qu’il finit par quitter Konya pour Damas. Cette séparation insup-portable pour Mowlâna, ne dura pas longtemps : Shams re-vînt à Konya au bout d’un an, mais peu après, il disparut à jamais, dans un mystère total.

Mowlâna demeura inconsolable jusqu’à la fin de ses jours ; il composa un Divân d’une rare beauté lyrique qu’il dédia à la mémoire de l’ami disparu.

Rûmî mourut à Konya en 1273. C’est dans cette ville de l’actuelle turquie qu’a été construit son mausolée.

La pensée de Mowlâna

Mowlâna n’est pas uniquement un grand poète ; il est aussi un maître à penser humaniste, un directeur spirituel dont les enseignements sont destinés à l’évolution de l’homme.

A son époque, il acquit une telle célébrité qu’un grand nom-bre de personnes issues de différentes couches sociales choi-sirent de devenir ses disciples, parmi lesquelles beaucoup de personnalités influentes et haut placées.

Selon Mowlâna, l’être humain est sur cette terre en exil, à la quête de son “soi suprême” qui est son origine et sa fin, le monde matériel et terrestre étant le monde de l’apparence et de la multitude, alors que son origine est le monde de la substance et de l’Unité.

La nostalgie de cet exil se fait entendre dans le chant de la flûte, qui raconte l’histoire de la séparation, (dans le prélude de son célèbre Masnavi, œuvre majeure de l’enseignement soufi).

(Poème : Ecoute le ney qui se plein ainsi de la séparation

Depuis qu’on m’a arraché d’entre les miens

Se plaignant de mon timbre

Quiconque est coupé de ses racines

Cherche sa vie durant à les retrouver

..............

Ce grand dignitaire religieux musulman iranien, respectait toutes les confessions et considérait que l’être humain est un citoyen du monde qui ne se limite pas aux frontières géogra-phiques.

(poème…………………………………………………………… )

Plusieurs siècles avant la Renaissance, il avait déjà une conception humaniste propre à lui, basée sur sa vision mysti-que.

Le grand écrivain contemporain Zarrine Koub, dans son livre intitulé “Pas à pas vers la Révélation Divine” écrit : « A maintes reprises, au moment de l’exécution des condamnés, Mowlâ-na se présentait sur les lieux et intervenait en leur faveur afin de les sauver de la sentence de la mort » (page 306) ; « il cô-toyait les défavorisés et les laissés pour compte et passait du temps avec eux » (page 307). « Lui qui était un des faghihs les plus renommés de son époque, lorsqu’il rencontrait les repré-sentants des autres religions (prêtres, rabbins et moines), les saluait avec modestie, pour démontrer à ses concitoyens à quel point il déplorait le fanatisme. Il était affectueux et atten-tif avec les enfants qu’il croisait sur son chemin et discutait avec eux. Une fois, il marqua un tel respect vis-à-vis d’une femme qui tenait une maison close, qu’il suscita l’étonnement de tous » (page 308).

Il ne cessait de répéter que « si les chemins sont différents, le but est unique », et « seul l’Amour relie l’homme à son Bien-Aimé ». Ainsi, son enseignement porte l’empreinte de la plus large tolérance.

L’opposition des dogmatiques religieux avec le soufisme n’est pas tant due à cette attitude qu’à l’approche directe de Dieu qui contribue à une élévation spirituelle, contournant la présence des théologiens intégristes et leur lectu-re exclusive et discriminatoire de l’Islam.

C’est la raison pour laquelle ces derniers ont toujours considé-ré le soufisme comme leur ennemi juré qu’il fallait éradiquer.

Ceux qui en d’autres temps ont crucifié Hallaj et Sohravardi, n’hésitent pas aujourd’hui à oppresser les derviches en Iran, à démolir leurs écoles, Khaneghah, et leurs sanctuai-res, à interdire leur rassemblements, à les emprisonner et à les persécuter de mille manières…

Epris d’un Dieu d’Amour, d’un Bien-Aimé qu’il décrit comme étant l’essence de chaque être, Mowlâna invite tout un cha-cun à lever le voile de son cœur pour découvrir Celui qui est en nous et en qui nous sommes. Selon lui c’est dans la com-munion avec tout ce qui existe que nous pouvons vivre la présence du Divin et nous réconcilier avec nos sens, avec la Vie, mais également avec la mort, considérée comme une résurrection.

Même si le rythme et la musique sont inhérents à la poésie persane depuis le Ve siècle, l’extase de Mowlâna transcende cette école de littérature à son apogée. Il dit lui-même : « tous les chemins mènent à Dieu. J’ai choisi celui de la musi-que et de la danse ».