Umalali

Garifuna women’s project
Sortie le 10 avril 2008
Label : Cumbancha
Umalali , mot de la langue Garifuna signifiant « voix » est un projet dont le but est de magnifier la beauté et la puissance des voix féminines d’une communauté à l’histoire incroyable. Issues d’une culture ancrée sur la côte caraïbe de l’Amérique centrale, qui possède des traditions d’origines aussi diverses que celles d’Afrique de l’Ouest et des indiens caribes natifs du continent. Des chanteuses des communautés Garifuna du Belize, du Honduras et du Guatemala ont participé à ce projet, en tout une cinquantaine de femmes de toutes les générations. Il aura fallu dix ans pour réaliser cet album, à l’origine enregistré dans les maisons, les chalets de plage, les fêtes de village et autres sessions intimes et improvisées. Il faut noter que la plupart de ces femmes n’avaient jamais enregistré quoi que ce soit. Elles ont été invitées à participer à des séances de travail avec le désormais célèbre artiste Andy Palacio et son Garifuna Collective mais aussi sous la houlette du producteur bélizien Ivan Duran qui a initié ce projet et dont le but louable est la préservation des traditions de son pays.
Cruel destin. Le chanteur Andy Palacio commençait avec sa voix chaleureuse et sa guitare émouvante à faire sortir de l’anonymat international son petit pays, le Belize, ex- Honduras britannique entouré par le Mexique, le Guatemala et la mer des Caraïbes, quand une crise cardiaque l’a foudroyé à 47 ans la nuit du 19 janvier 2008. Il devait effectuer au printemps de cette année une importante tournée en Europe et promouvoir par la même occasion le chant féminin de sa communauté, les Garifuna ou Garinagu, représenté à ses côtés par Sofia Blanco, Marcela “Chela“ Torres et Desere Arana. La première est originaire du Guatemala, ses cadettes Marcela du Honduras et Desere (prononcez Désirée) une Bélizienne d’une vingtaine d’année reconnue pour la force de sa voix dans les cérémonies spirituelles dügü dans le sud de son pays. Elles chantent sur l’album Umalali The Garfifuna Women’s Project. Un disque qui a nécessité des années de recherches et de travail à son réalisateur Ivan Duran pour enregistrer les voix, peaufiner les musiques qui révèlent au monde un chant puissant et méconnu. Ce jeune producteur bélizien, de naissance mexicaine et de parents barcelonais, a fini par trouver les rythmes, les couleurs qui servent d’écrin délicat à cette sélection minutieuse de douze chansons profondes et poignantes. Ce sont souvent des litanies sans âge qui disent une grande humanité. Celle de ces femmes Garifuna qui n’ont pas une minute à elles, à force de s’occuper de leurs enfants, de leur foyer. Ce sont leurs improvisations qui inspirent les paranda et punta, les deux genres musicaux dominants du Belize, y compris dans leur version moderne, comme le punta rock. Ce sont leurs improvisations qui inspirent les paranda et punta, les deux genres musicaux dominants du Belize, y compris dans leur version moderne, comme le punta rock. « Les femmes Garifuna n’ont guère la possibilité de s’exprimer. Elles ne disent pas leurs problèmes, préférant parler de choses artificielles. Elles travaillent beaucoup, se battent, mais ne le disent pas ouvertement », raconte Sofia Blanco, la cinquantaine radieuse en robe aux couleurs du drapeau Garifuna, trois bandes horizontales, jaune, blanche, noire, qu’elle met chaque 19 novembre. C’est le Settlement Day, fête nationale depuis quelques années au Belize, commémorant la communauté de Sofia, Desere et Marcela, moins de 10 % des 300 000 habitants du seul pays anglophone d’Amérique Centrale, le Belize.Une mosaïque d’Africains, d’Amérindiens, d’Européens, d’Indiens des Indes, de Chinois, et où les Garifuna béliziens ont souvent du mal à se faire reconnaître, tous comme leurs frères encore plus minoritaires au Guatemala, au Honduras et au Nicaragua. « Je me sens Garifuna et je mourrai Garifuna », déclare Sofia Blanco exprimant par là la fierté de descendre des seuls Noirs de toutes les Amériques qui n’ont pas été mis en esclavage. Cela remonte à 1635 quand deux bateaux négriers s’échouent au large de Saint-Vincent. Les déportés africains survivant sont recueillis par les Arawaks et les Caraïbes avec lesquels ils se métisseront : les Garifuna. Avec arcs et flèches, ils infligeront de cinglantes défaites aux armées britanniques qui ont ravi le Belize aux Espagnols et aux Français. Mélange de dialectes africains, amérindiens, d’anglais, d’espagnol et de français, le parler Garifuna est devenu la langue d’un peuple qui a pu préserver sa liberté, accueillant même les esclaves échappés des plantations, et que les Britanniques parviendront à déporter à la fin du XVIIIe au large du Honduras. Mais en 1823, les Garifuna réussiront par revenir en pirogues sur les côtes verdoyantes du Belize : c’est le souvenir du Settlement Day de ce micro- Etat libéré de la couronne britannique en 1981.

« Je me sens Africaine. C’est important pour moi car nos ancêtres viennent d’Afrique. Il ne faut pas oublier ça, l’histoire des Garifuna », souligne Sofia Blanco, la voix leader d’Umalali The Garfifuna Women’s Project. Interprétant de son timbre saisissant presque la moitié du disque, Sofia, qui vient de Livingtson, bourg de la côte du Guatemala à deux pays du Belize, et a appris à chanter à ses 17 ans, rappelle que sa tradition est d’abord un chant rythmé par les tambours pour invoquer les morts, l’esprit des ancêtres. Il est aussi une chronique des douleurs passées et des difficultés de la vie quotidienne. Avec l’aide du Collective Garifuna, le groupe de feu Andy Palacio, Ivan Duran a marié cette culture avec de douces touches de jazz, de rock, de blues pour lui donner une actualité imparable et peut-être lui redonner une nouvelle vie parce qu’« avant les femmes Garifuna produisaient plus de chansons, et moins maintenant », regrette Sofia Blanco.