Las Maravillas de Mali

Africa Mia
Sortie le 3 mai 2019
Label : Decca Records

« En 1999, lors de mon tout premier voyage en Afrique, j’ai rencontré dans un maquis à Bamako, au Mali, un flûtiste nommé Dramane Coulibaly. Je lui ai alors demandé pourquoi il aimait tant jouer la musique cubaine. Il m’a répondu « je suis parti à La Havane dans les années 60 pendant 10 ans… » Cette phrase a résonné en moi et m’a emmené dans une quête de 20 ans entre le Mali, la Côte d’Ivoire, le Niger et Cuba pour retrouver les membres de ce groupe mythique dont il faisait parti : Las Maravillas de Mali. J’ai, pendant toutes ces années, retrouvé d’autres musicien de cet orchestre, je les ai filmés, enregistrés puis en 2016, j’ai ramené à La Havane, le Maestro, Boncana Maïga, le dernier survivant de cette incroyable épopée afro cubaine.

50 ans plus tard, sur les traces de son passé, nous avons réenregistré des nouvelles versions de leur unique album produit au studio Egrem en 1967.

Cet album « Africa Mia », qui est aussi la bande originale du documentaire du même nom, est le témoignage de cette fabuleuse histoire commencée dans les années 60 au temps des échanges entre l’Afrique et Cuba. L’histoire des Merveilles du Mali ! »

Richard Minier
En 1999, lors de mon tout premier voyage en Afrique, j’ai rencontré dans un maquis à Bamako, au Mali, un flûtiste nommé Dramane Coulibaly. Je lui ai alors demandé pourquoi il aimait tant jouer la musique cubaine. Il m’a répondu « je suis parti à La Havane dans les années 60 pendant 10 ans... » Cette phrase a résonné en moi et m’a emmené dans une quête de 20 ans entre le Mali, la Côte d’Ivoire, le Niger et Cuba pour retrouver les membres de ce groupe mythique dont il faisait parti : Las Maravillas de Mali. J’ai, pendant toutes ces années, retrouvé d’autres musicien de cet orchestre, je les ai filmés, enregistrés puis en 2016, j’ai ramené à La Havane, le Maestro, Boncana Maïga, le dernier survivant de cette incroyable épopée afro cubaine.

50 ans plus tard, sur les traces de son passé, nous avons réenregistré des nouvelles versions de leur unique album produit au studio Egrem en 1967.

Cet album « Africa Mia », qui est aussi la bande originale du documentaire du même nom, est le témoignage de cette fabuleuse histoire commencée dans les années 60 au temps des échanges entre l’Afrique et Cuba. L’histoire des Merveilles du Mali !

Richard Minier

« Rendez vous ce soir, chez Fatimata, nous allons danser jusqu’à l’aube, mon ami... » Ce doux refrain en version latino en aura fait danser plus d’un. C’était au temps béni des premières années de l’indépendance du Mali. Et ce titre en fut la bande-son, un hymne qui sera vite repris dans toute l’Afrique de l’Ouest. « Ça a fait un boom tout de suite ! Pas une fête sans ce tube-là ! C’était très chaud ! », se rappelait il y a quelques années Cheikh-Tidiane Seck, futur incontournable de la musique moderne malienne, qui fut bercé par ce son diffusé sur les ondes de la radio nationale, mais qui marqua tout autant les esprits outre-Atlantique, à Cuba. C’était là, dans les mythiques studios Egrem logés au cœur de La Havane, qu’il fut enregistré par les Maravillas du Mali, des étoiles que certains iront même jusqu’à comparer à l’Orquestra Aragon, l’institution locale. Pas de doute, ce premier primesautier 45-tours fit définitivement entrer le Mali dans l’ère moderne. Quelques mots bien balancés pour conter sur fonds de flûtes enchantées et de percussions endiablées l’histoire véridique d’une hôtesse de l’air de la Sabena, cousine du batteur de l’orchestre, à qui le flûtiste Dramane Coulibaly donna rendez-vous pour aller guincher jusqu’à l’aube… Quelle histoire !

Car avant d’en arriver, tout commence le 22 septembre 1960, lorsque le Mali accède à l’indépendance. Et son président, Modibo Keita va vite promouvoir l’émancipation face au modèle colonial français. L’heure est à l’authenticité, une valeur de cohésion nationale qui prend tout son sens en musique. Il s’agit de composer un répertoire original, inscrit dans la modernité tout en labourant le champ fertile de la tradition. C’est ainsi qu’en 1963, dix jeunes musiciens originaires de tout le Mali sont recrutés pour aller suivre une formation à La Havane : l’un étudie la médecine, l’autre est employé des Postes, un autre tâte du ballon rond… Il y a Dramane, originaire de Ségou, pour qui la musique est une passion, et Boncana Maïga, un saxophoniste et banjoïste, le seul qui s’est déjà taillé une bonne réputation à l’Ouest du Mali avec le Negro Band de Gao. En janvier 1964, ils atterrissent à Cuba, où ils deviennent vite des symboles de l’amitié des pays frères. C’est le début d’un destin en rien banal pour un combo tout à fait original.

Un an après leur arrivée, les Maliens intègrent le Conservatoire Alejandro Garcia où ils ont pour professeurs des maestros, dont Rafaël Lay, le boss de l’Aragon. Ils prennent pour nom les Maravillas du Mali, référence aux Maravillas de Florida, un groupe qui affole alors la jeunesse de La Havane. Quant aux jeunes Maliens, ils conquièrent la population cubaine séduite par leur mixture afro-cubaine, un gumbo 100 % dansant.

Ils s’offrent une tournée dans toute l’île, ils sont les stars musicales du Festival Panafricain et des semaines de coopération de la Havane de 1968 et feront même danser le Che ! De l’autre côté de l’Atlantique, la rumeur enfle. « Boogaloo sera Mali », pour paraphraser l’un de leurs thèmes emblèmes. Sauf que le 19 novembre 1968, un coup d’Etat renverse le Président Keita. Le lieutenant Moussa Traoré prend la direction du pays. Changement d’ambiance pour les amateurs d’indépendance cha cha, inversement de tendance pour les Merveilleux Maliens qui au même moment gravent pour la postérité leurs chachacha et guarachas, des son montunos et boléros de toute beauté… Parmi ceux-ci, Rendez-vous Chez Fatimata, qui sort en 45-tours : du Niger à la Guinée, toutes les familles chaloupent sur ses rythmiques collé-serré. Mais désormais associé à l’ancien régime, l’orchestre sitôt rentré au pays est ostracisé, bientôt dissous. Rendez-vous manqué avec l’histoire ! Jusqu’à ce qu’un demi-siècle plus tard, l’album soit enfin ressorti des oubliettes de la mémoire collective.