Frank Woeste

Double You
Sortie le 17 mars 2011
Label : World Village
A 34 ans, Frank Woeste est plus qu’un jeune espoir du jazz français. Depuis une dizaine d’années, l’accompagnateur privilégié d’Ibrahim Maalouf et de Médéric Collignon a su démontrer ses talents de chercheur sonore. Admirateur de Miles, Monk ou Jimi Hendrix, il joue des mains et des tripes, explorant sans cesse les possibilités du piano et du Fender Rhodes.

FRANK WOESTE – Piano
JEROME REGARD – Contrebasse
SYLVAIN RIFFLET – Clarinette
MAGIC MALIK – Flûte
FRANCOIS BONHOMME – Cor
A 34 ans, Frank Woeste est plus qu’un jeune espoir du jazz français. Depuis une dizaine d’années, l’accompagnateur privilégié d’Ibrahim Maalouf et de Médéric Collignon a su démontrer ses talents de chercheur sonore. Admirateur de Miles, Monk ou Jimi Hendrix, il joue des mains et des tripes, explorant sans cesse les possibilités du piano et du Fender Rhodes. Passé maître dans l’art du croisement, manipulant sans cesse le génome du jazz contemporain, de la musique classique et de la pop, il revient aujourd’hui avec le deuxième album de son trio, « W » (à prononcer à l’anglaise). Marqué par la présence imposante, mais jamais écrasante, de Magic Malik, ce « Double You » explore le thème de la « dualité ». Des compositions où le contrepied règne, des improvisations structurées qui ne s’égarent jamais, des arrangements splendides et une entente harmonieuse entre tous les acteurs : l’album de la confirmation ?

Biographie

« être jazzman, c’est un état d’esprit, celui du chercheur » assume Frank Woeste, toujours en quête de nouveaux sons et de nouvelles harmonies pour faire vivre son jazz. Pour lui « les maitres sont les musiciens qui ont respecté leurs prédécesseurs mais ont poussé les frontières un peu plus loin, comme le rock pour Miles ou le hip hop pour d’autres. C’est la voie que je veux suivre ». De ses premières variations sur Chopin en 2004 (« Outward ») à son nouvel album « W », en passant par ses participations aux projets de Médéric Collignon (le « Jus de Bocse », superbe projet de reprises de « Porgy and Bess » ou de « Bitches Brew », avant de s’attaquer bientôt à l’oeuvre de King Crimson) ou d’Ibrahim Maalouf, le pianiste trentenaire remet toujours son touché sur l’établi. Souvent comparé à Brad Meldhau, parce qu’il faut bien le rattacher à quelqu’un, Frank a développé depuis dix ans un art du croisement, manipulant sans cesse le génome du jazz contemporain, de la musique classique et de la pop.

C’est dès le début de l’adolescence qu’il pose les fondations de son propre laboratoire sonore. Né à Hanovre en 1976 dans une famille passionnée de musique, Frank a déjà touché à tous les instruments à 10 ans : batterie, guitare, basse, accordéon, clarinette, flûte à bec... et surtout le piano, dont il perçoit très vite toute l’amplitude harmonique, mélodique et rythmique. En famille, il improvise déjà avec son père, sa soeur et un voisin jazzman qui lui enseignera ses premiers rudiments. Du coup, à 11 ans, il gagne déjà un peu sa vie avec la musique en passant derrière l’orgue de l’église locale tous les dimanches. « A l’école, avec cet argent de poche, j’étais le roi du pétrole » s’amuse Frank aujourd’hui.

Très tôt, donc, Frank grandira avec son double bagage, classique et jazz. Le classique, pour sa rigueur, « pour jouer du piano et ne pas être joué par lui », le jazz, pour son goût pour l’impro. Quand il partira au Conservatoire de Brême pour faire ses classes, il passera d’ailleurs ses nuits dans les caveaux du coin pour improviser avec les jazzmen. Normal pour un musicien qui considère que les frontières entre les genres sont loin d’être hermétiques : « quand j’improvise, j’aime que l’improvisation soit liée à la composition. Qu’elle ne soit pas complètement arbitraire. Cela ne veut pas dire que je n’aime pas le free, mais on peut apprendre de la construction classique, du développement naturel d’une sonate de beethoven par exemple ». En se perfectionnant plus tard auprès de John Taylor, pianiste anglais qui aura joué avec Gil Evans ou Lee Konitz, il comprendra d’ailleurs cette évidence essentielle : « être bon musicien est plus important que bon pianiste » confie-t-il aujourdhui, « devenir bon pianiste, c’est assez simple, mais on peut jouer autant de notes que l’on veut sans pour autant que cela veuille dire quelque chose. Il faut savoir chasser le superflu ».

Plus tard, Frank débarque en France en 1997 pour achever sa formation dans la section jazz du Conservatoire de Paris, et ne repartira plus. Frank, qui a désormais la double nationalité franco-allemande y a trouvé une compagne, d’abord, mais aussi des compagnons d’aventure, puisé dans le très éclectique vivier parisien de musiciens de « tout bord ». De quoi satisfaire son esprit « chercheur » : Frank s’est fait un nom dans le milieu grâce à son talent d’expérimentateur au piano, mais aussi au Fender Rhodes, poussé dans ses derniers retranchements. Des qualités qui l’auront amené à fréquenter les plus grands musiciens francais et européens : il joue entre autres avec Médéric Collignon, Ibrahim Maalouf, Michel Portal, Flavio Boltro, Louis Sclavis, Aldo Romano, Markus Stockhausen, Dominique Pifarely, Francois Corneloup, Rosario Guliani, Magic Malik. « Je suis assez exposé avec Ibrahim Maalouf et Médéric Collignon » explique Frank. « On me perçoit comme un musicien polyvalent, grâce à mon travail sur le Fender Rhodes, où j’ai développé un traitement sonore très spécifique, ce qui fait que les gens m’appellent pour ca, pour ce son à la frontière du jazz, du rock, de la pop. » Rendre malléable la matière sonore du jazz, c’est justement l’objectif qu’il s’est fixé sur le nouvel opus de son trio, W. Histoire également de confirmer qu’il est plus qu’un « des grands espoirs du piano jazz » (selon Jazzman en 2005).

L’album

« Quand je joue, j’ai parfois l’impression de manquer de main, et j’avais besoin de retranscrire cette dimension orchestrale dans le trio. » voilà la direction qu’a choisie Frank Woeste sur « W ». Un « Double You » sans rapport avec le 43e président des Etats Unis, qui renvoie aux dualités chères à Woeste : le balancement entre la main droite et la main gauche du piano, entre la précision mélodique et la recherche harmonique, la composition et l’improvisation.

Loin de jouer les élèves besogneux, Frank prend toutes les libertés avec son piano et marque chaque morceau de sa science du contrepoint, pensant son instrument tour à tour comme une guitare électrique, une contrebasse ou un ensemble de cuivres.

Avec fluidité et limpidité, il démontre également la complicité nouée au fil des années avec son trio, tirant partie de l’inépuisable énergie de son batteur Matthieu Chazarenc ou de la folie cultivée de Jérôme Regard. La complicité, on la sent également très forte avec Magic Malik : non seulement le flûtiste chamane souligne en quelques interventions les moments de grâce de l’album, mais il laisse également sa voix illuminée planer au dessus de certains morceaux, leur donnant une troublante coloration mystique. Tout en nuance, doté d’arrangements parfaitement léchés mais surprenant à chaque mesure, « W » ouvre d’étonnantes brèches entre le jazz et la pop, sans pour autant tomber dans les clichés habituellement réservés au post jazz.

Le trio

Frank Woeste (piano, Fender Rhodes)

Jérome Regard (contrebasse) Coordinateur du département Jazz au Conservatoire National de Région de Lyon, Jérôme Regard a déjà accompagné André Ceccarelli, Médéric Collignon ou Louis Winsberg. Présenté à Frank Woeste par l’intermédiaire du batteur Matthieu, il a remplacé

Matthias Alamane au sein du trio depuis plusieurs années. « Sa très large culture me pousse à essayer de nouveaux sons » apprécie Frank Woeste.

Matthieu Chazarenc (batterie) Une vieille connaissance croisée au Conservatoire de Paris où il étudie avec Daniel Humair. Depuis très logntemps. Fidèle de Frank Woeste qui aime « son énergie inépuisable », il partage avec lui son goût pour les musiques diverses, du rock au hip hop. Il a aussi joué avec Stéphane Belmondo, Alain Jean Marie ou Jeff Gardner.